lundi 27 août 2012

Le voile de Salammbô

Salammbô
lithographie d'Alfons Mucha (détail)


Le 24 novembre prochain sera le cent-cinquantième anniversaire de la publication de Salammbô, troisième roman de Gustave Flaubert (après Mémoires d'un fou et Madame Bovary). Dès le lundi 24 novembre 1862, jour de sa mise en vente, le succès de Salammbô fut immédiat et deux mille exemplaires furent écoulés en deux jours. Après une lecture publique aux palais des Tuileries et des extraits du roman publiés dans la presse, l'histoire de la fille d'Hamilcar, adoratrice de la déesse Tanit, fit le tour des salons de l'époque et suscita un véritable engouement.

L'année suivant la parution du roman, Salammbô fut très en vogue dans les bals costumés de la haute société du Second Empire. L'impératrice Eugénie a même failli paraître à l'un d'eux travestie en princesse carthaginoise. Flaubert mentionne dans sa lettre du 24 janvier 1863 adressée à Félicien de Saulcy, la demande qui lui a été faite "en haut lieu" des modèles de costumes de Salammbô. Flaubert contacta Alexandre Bida à ce sujet, mais finalement, l'impératrice renonça à son projet par crainte d'être inconvenante dans un tel costume.

Quelques années plus tard, Salammbô devint une source d'inspiration artistique, tant pour les peintres, illustrateurs et sculpteurs que pour les musiciens. Or, bien que l'orientalisme soit à la mode depuis la campagne d'Égypte et la publication en 1809 de la "Description de l'Égypte" (monumental ouvrage commandé par Bonaparte) la civilisation carthaginoise était alors quasiment inconnue, et le demeure d'ailleurs encore un peu de nos jours.

Salammbô (?)
Adrien Tanoux - 1921
(collection privée)
Le manque de références sur les carthaginois a valu quelques avatars à Salammbô, parfois représentée dans un décor égyptien (voire confondue avec Cléopâtre) ou représentée en simple odalisque, comme dans le tableau ci-dessus. Tableau dans lequel on cherchera en vain un signe distinctif permettant de l'identifier clairement, tel la chainette d'or qu'elle portait aux chevilles par exemple.

Salammbô, carte publicitaire, 1897

Les extrapolations contemporaines dans la BD et les jeux vidéos concernant la Salammbô décrite par Flaubert ne seront pas évoquées ici. Je préfère m'en tenir aux représentations des illustrations du roman, et surtout aux quelques œuvres des peintres de chevalet, quel que soit leur degré de conformité avec le texte de Flaubert.

La première description de l'apparence de Salammbô se trouve dans le premier chapitre du roman "Le Festin", dont voici l'extrait correspondant



Ce sont deux illustrateurs qui ont le plus fidèlement  reproduit la description de Salammbô par rapport au texte ci-dessus. L'une se trouve dans une édition de 1930, l'autre dans une édition contemporaine du roman traduit en russe.

Salammbô (chapitre I)
illustration de François-Louis Schmied
édition Le Livre, Paris 1923
Salammbô (chapitre I)
Denis Gordeeva
édition russe contemporaine


















« Elle marchait en inclinant la tête,
et tenait à sa main droite une petite lyre d’ébène.
»



Au troisième chapitre du roman,  vêtue de sa "longue simarre blanche", Salammbô se trouve sur sa terrasse. Auprès d'elle Taanach, sa vielle nourrice et servnate, joue sur son nebal la musique mélancolique que sa maîtresse lui a demandée.

















C'est à l'épisode reproduit ci-dessus que se rapporte la lithographie d'Alfons Mucha intitulée Incantation

Incantation
Alfons Mucha - 1898
(consulter la notice)
Mucha a choisi de représenter Salammbô les seins nus, une liberté par rapport au texte qui se justifie pleinement par l'effet artistique obtenu, l'image combinant à la fois la scène d'adoration de Tanit (déesse lunaire) et, par les volutes de l'écharpe passant derrière la tête de Salammbô, la scène du serpent que l'on verra au chapitre dix.

Ci-dessous, la même scène sur la terrasse — « O Tanit ! tu m’aimes, n’est-ce pas ? Je t’ai tant regardée ! Mais non ! tu cours dans ton azur, et moi je reste sur la terre immobile. »  —  illustrée par Victor Armand Poirson pour l'édition de 1887. Voir ici ses autres illustrations.

O Tanit ! tu m’aimes, n’est-ce pas ?
illustration de Salammbô par Victor Armand Poirson
Maison Quantin, Paris 1887

Les deux toiles ci-dessous, Sérénade au clair de lune et Nuits arabes, sont de Hans Zatzka. Elles semblent visiblement avoir été inspirées par le même épisode de Salammbô sur la terrasse...

Sérénade au clair de lune
Hans Zatzka (1859-1945)
collection privée

Nuits arabes
Hans Zatzka
collection privée

Ci-dessous, toujours la scène de Salammbô priant Tanit (la lune) mais cette fois illustrée par Georges Rochegrosse, dont Flaubert avait pressenti le talent alors qu'il était encore un enfant. « Dès que tu auras du talent, je te ferai commander les illustrations de Salammbô ». Lire en ligne le livre consacré à Rochegrosse par Jean Valmy-Baysse (1874-1962).

Ô Tanit ! Salammbô dans sa longue simarre blanche
illustration de Salammbô par Georges Rochegrosse
édition Ferroud, Paris 1900

Georges Rochegrosse me permet de faire la transition entre ce long épisode du chapitre trois que nous venons de voir et Le Serpent (dixième chapitre du roman) où l'on va retrouver Salammbô, non plus sur sa terrasse mais dans ses appartements.

Au chapitre cinq, croyant la séduire, Mâtho a dérobé le Zaïmph au temple de Tanit pour l'offrir à Salammbô. La vue du Zaïmph, voile sacré de la déesse protectrice de la cité que personne ne peut contempler sans être en danger de mort, a profondément perturbé la jeune femme. Horrifiée par le sacrilège de Mâtho, Salammbô a refusé le somptueux cadeau. Cependant la contemplation suivie de la perte du  Zaïmph pour la cité de Carthage ne cessent d'obséder Salammbô.
















Les colombes de Salammbô (symbole évident de sa virginité) ont merveilleusement inspiré Georges Rochegrosse


Salammbô et les colombes
Georges Rochegrosse - 1895
Musée d'Art et d'Histoire Marcel Dessal, Dreux (notice)

Bouleversée par le souvenir du Zaïmph, Salammbô, a confié son tourment à Schahabarim, son mentor et prêtre de Tanit. Ce dernier l'a persuadée de se rendre dans le camp de Matho afin d'y reprendre le Zaïmph, ce qui devrait, selon lui, libérer Carthage assiégée par les mercenaires. Avant de prendre sa décision, Salammbô se tourne vers son serpent familier pour connaître l'avenir « car on tirait des augures d’après l’attitude des serpents ». 




















Le serpent familier de Salammbô, tel que décrit par Flaubert dans le texte ci-dessus avec « ses noirs anneaux tigrés de plaques d’or »,  est probablement un python royal.

Bien qu'en réalité un python d'une telle taille soit incapable de se lever "tout droit" sur sa queue, on ne peut pas reprocher à Gaston Bussière d'avoir respecté le texte de Flaubert.

Salammbô
Gaston Bussière - 1920
Musée des Ursulines, Mâcon

Cette métaphore de la scène qui se déroulera plus tard sous la tente de Mâtho correspond bien au caractère divinatoire attribué au serpent. À ce propos, il est intéressant de lire le texte explicatif de la scène dans la notice du tableau.

Les images de Salammbô enlacée par le serpent sont très nombreuses dans les éditions illustrées du roman, mais peu de peintres ont représenté cette scène. Alors quelle bonne surprise en découvrant celui de Carl Strathmann

Salammbô
Carl Strathmann - 1895
Klassik Stiftung Weimar, Allemagne

En dehors de ses dates (Düsseldorf 1866-1939 Munich) on ne trouve guère d'information sur ce peintre symboliste allemand. C'est bien dommage car j'aime beaucoup sa Salammbô.

Carl Strathmann - Salammbô - détail

Ainsi couchée avec le serpent qui paraît l'embrasser, Salammbô semble la Belle au Bois Dormant sur le point d'être éveillée par le Prince Charmant !

Enfin nous voici parvenus au chapitre onze du roman, celui ou Salammbô, parée comme une reine, va trouver Mâtho dans son campement pour lui demander de restituer le Zaïmph, le voile sacré de la déesse Tanit.  Elle arrive sous la terrasse qui ferme le camp des Barbares















À ma connaissance, il n'existe pas de peinture représentant le moment de l'histoire où, juste avant de se dévoiler pour être aussitôt recouverte par le voile de Tanit, Salammbô  se trouve enlacée par Mâtho à genoux.

Cependant, Théodore Rivière a merveilleusement reproduit cette scène et, qui plus est, en plusieurs exemplaires, comme le précise la notice des musées de France.


Salammbô chez Mâtho
bronze patiné et pierres précieuses
notice de Sotheby's
Salammbô chez Mâtho
bronze patiné argent
notice de Sotheby's






Salammbô chez Mâtho
bronze patiné brun et or
notice de Sotheby's
Salammbô chez Mâtho
bronze, ivoire, or et turquoises
notice du musée d'Orsay




























(cliquer sur les photos pour les agrandir)



Pour terminer ce billet voici un tableau, intitulé Salammbô,  bien que Salammbô portant un sabre ne corresponde à rien dans le roman de Flaubert. À moins qu'il ne s'agisse du court instant durant lequel elle s'empare du poignard posé près de Mâtho endormi, mais qui tombe très vite de ses mains...




Salammbô
Benjamin-Constant
notice de Sotheby's



Le mystère de la belle du XIXe (dont un portrait orne un musée parisien) n'est guère dévoilé avec ce nouveau billet préliminaire à son histoire. Que les impatient(e)s de faire sa connaissance veuillent bien me pardonner. Son histoire est si morcelée que sa reconstitution est un véritable travail de limier. J'ai appris tout récemment qu'elle a écrit un roman. Je vais donc me rendre à la Bibliothèque Historique de Paris pour le consulter. J'espère pouvoir y avoir accès, mais cela risque de prendre un certain temps. Merci de bien vouloir excuser ce retard.



Source pour les illustrations de Salammbô :
Listes des éditions illustrées et des BD adaptées du roman
autre liste des éditions illustrées par ordre chronologique
toutes les illustrations, reproduites chapitre par chapitre




 ©VesperTilia, échos-de-mon-grenier 2012

47 commentaires :

  1. Quel travail! Quelles recherches! Quelle superbe article! Bravo et merci Tilia!

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    1. Merci à vous pour votre appréciation enthousiaste :)

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  2. Que nos blogs pâlissent devant un tel article ! Il faut y revenir et le déguster à petites doses.
    Que de symboles en cette histoire qui ne sont pas sans flirter avec certains de nos fantasmes. Reste l'écriture de Flaubert et ses visions que bien des peintres ont tenté d'approcher. Ces œuvres, à leur époque, ne jouèrent-elles pas le rôle du cinéma à notre époque ? Donner une vision à la chose écrite, une transcription de l'œuvre toujours plus faible que le texte original ?

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    1. Malgré sa boutade quant au futur talent du jeune Rochegrosse, Flaubert était viscéralement opposé à l'illustration de Salammbô.

      « Quant aux illustrations, m’offrirait-on cent mille francs, je te jure qu’il n’en paraîtra pas une. Ainsi, il est inutile de revenir là-dessus. Cette idée seule me fait entrer en frénésie. Je trouve cela stupide, surtout à propos de Carthage. Jamais, jamais ! Plutôt rengainer le manuscrit indéfiniment au fond de mon tiroir. Donc, voilà une question scindée ! »
      Flaubert, lettre à Jules Duplan, 10 juin 1862.

      Les premières illustrations de Salammbô sont celles de Pierre Vidal. Elles ont été éditées par Alphonse Lemerre en 1884, soit quatre ans après le décès de Flaubert.

      L'opposition de Flaubert à l'illustration de Salammbô se comprend tout à fait en regard des libertés des artistes par rapport au texte qu'il a eu tant de mal à peaufiner.
      Cependant il aurait été dommage d'être privé d'images, telles que celles de Rochegrosse par exemple.

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    2. Place au rêve et à l'imagination qui ne se trouvent que derrière les mots. Merci de ces précisions, chère Tilia.

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  3. Bonjour Tilia.
    Pas le temps ce matin de tout lire, je repasse demain.

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  4. Quel bonheur pour un écrivain d'avoir amené un nouveau personnage au Panthéon de l'imaginaire, de lui avoir donné un nom, une vie, une apparence, toute une symbolique qui le caractérise et le fait reconnaître immédiatement. Le serpent a sans doute une connotation phallique... Il aurait été dommage de se priver des voiles, des drapés et des seins de Mucha.

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    1. Tu as raison,Cergie, même le nom de Salammbô a été inventé par Flaubert. Il a entièrement façonné ce personnage extrêmement fascinant.
      Par contre tout le contexte historique (la révolte des Mercenaires, le siège de Carthage, etc) tout est largement inspiré des textes anciens, Polybe notamment.

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  5. Du moment qu'un type est fixé par le crayon, il perd ce caractère de généralité, cette concordance avec mille objets connus qui font dire au lecteur : « J'ai vu cela » ou « Cela doit être ». Une femme dessinée ressemble à une femme, voilà tout. L'idée est dès lors fermée, complète, et toutes les phrases sont inutiles, tandis qu'une femme écrite fait rêver à mille femmes.

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  6. Défense de déposer de la musique au pied de mes vers !

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    1. "nombreux sont les compositeurs qui ont mis en musique des poèmes de Victor Hugo : outre Liszt, Bizet, Saint-Saëns, Lalo, Massenet, Franck, Fauré, et même Wagner, ont composé des mélodies sur des textes du poète français."
      Lire l'article complet

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  7. Quel billet ! Bravo Tilia ! Trop dense, je reviendrai plusieurs fois le lire et admirer...
    A bientôt
    Bises

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  8. c'est l'illustration d'un livre qui me donne envie de le lire..
    ensuite j' oublie l'image imposé, je le sépare du texte..
    magnifique billet!

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    1. Tu veux parler de l'illustration de couverture, je suppose ?..
      C'est tout un art de choisir une image pour illustrer la couverture d'un roman. Pour s'en rendre compte il suffit de voir comme les couvertures changent au fil des rééditions. Je pense plus particulièrement aux romans en format de poche. Un exemple parmi tant d'autres : Le grand Meaulnes

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  9. Les voiles du précédent billet étaient le lien évident préparant celui-ci... Encore un merveilleux moment à découvrir toutes les illustrations de Salammbô. Elle en a inspiré plus d'un.
    Ton "Grenier" regorge de trésors que tu nous concoctes avec tant de précisions qu'on attend toujours avec impatience... ce qu'il nous révélera la prochaine fois !

    Biseeeeeeeeeeeeees de Christineeeeeeeeeeeee

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    1. Bravo Christineeeee ! tu as parfaitement saisi le lien entre la transparence des tissus couvrant les Merveilleuses du Directoire (qui s'inspiraient de l'Antiquité pour s'habiller) et l'apparence diaphane du Zaïmph, ce voile sacré de la déesse à laquelle Salammbô s'identifie.
      Bisous

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  10. Bonjour Tilia.
    Alors là voilà ta belle mystérieuse qui le reste encore.
    C'est la faute à Zola (Le Rêve)si j' ai des lacunes en littérature française, à part Madame Bovary je ne connais rien de l'oeuvre de Flaubert.
    L'histoire de Salammbô semblent passionnante.
    Les illustrations sont magnifiques.
    En ce moment je suis en train de lire, un thriller écrit par la femme de mon garagiste après un polar du même auteur.
    Sur un autre blog, je découvre des nouvelles de Maupassant.
    Je suis admirative du travail de recherche que tu fais, mais ça, je crois te lavoir déjà dit.
    Bises

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    1. Coucou Claude ! Toi aussi tu as des lacune en littérature ? eh bien tu n'es pas la seule ! J'ai toujours préféré Zola à Balzac et j'ai surtout beaucoup d'admiration pour Flaubert. Salammbô est une incontestable réussite, mais je t'avoue que je ne l'ai pas lu en entier : trop de passages effroyables, à déconseiller aux âmes sensibles !
      Bises et bonne lecture (actuellement, après La Cavale du géomètre, je lis Le Bestial Serviteur du pasteur Huuskonen j'adore les romans Arto Paasilinna, un auteur que je recommande !)

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  11. Cela vous a pris du temps mais cela va nous en prendre pour en venir à bout
    Nous n'allons pas nous en plaindre nous en avons pour notre argent je vais venir picorer un peu chaque jour et faire durer le plaisir
    Il se trouve que j'ai le roman de Flaubert dans ma liseuse électronique une bonne occasion de le lire.
    Magnifique travail
    Merci vous nous gâtez
    Bonne soirée

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    1. C'est bien le but, faire patienter en attendant que je finisse de démêler la pelote de l'histoire de... oups ! j'ai failli révéler le nom de ma mystérieuse dame :))

      Pour Salammbô, comme je l'ai dit à Claude, attention âmes sensibles, ce roman comporte plusieurs passages très durs. Les Carthaginois n'étaient pas des tendres et les Barbares non plus !
      Mes recherches sont aussi un plaisir et surtout un bon moyen pour moi d'explorer des périodes de l'Histoire que je connaissais peu.
      Il se fait tard, alors sans doute bonne journée :)

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  12. Une fois n'est pas coutume. Il faut que je revienne lire en détail ce fabuleux texte. Un travail minutieux illustrations à l'appui. Bravo tilia, quelle patience!

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    1. Merci pour ton appréciation positive. Reviens quand tu veux, la porte du grenier est toujours ouverte :)

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  13. Coucou Tilia,

    Wow ! Encore une billet sensationnel ! Tu es géniale ! Quel fantastique travail de recherche !
    J'avoue, je ne suis pas venue à bout de Salammbo, oeuvre magistrale mais un peu trop barbare à mon goût lol (pardon monsieur Flaubert), mais l'épisode du voile de Tanit est néanmoins très célèbre.

    En lisant sur ce billet que cet épisode du voile n'est pas représenté en iconographie et peinture, j'ai cherché et trouvé une représentation de Salammbo et de Mâtho ici avec le voile de Tanit semble-t-il ?
    http://www.mediterranees.net/romans/salammbo/lobel-riche/lobel5.html

    J'adore l'oeuvre de Benjamin Constant, mais cette représentation d'une Salammbo armée n'est pas unique, je ne sais d'où vient la méprise car Salambo était vestale et non guerrière. Je me souviens même d'un vieux clip de Julie Pietri (non ce n'est certes pas une référence de qualité mais un exemple de plus lol) dans lequel la chanteuse incarnait Salammbo, et finissait par déposer une arme sur un autel dédié à Tanit ! Les artistes d'Héroic Fantasy la représentent armée aussi...?!?!

    D'autre artistes ont représenté Salaambo avec son serpent, donc le célèbre tableau de Gabriel Ferrier et... et... en cherchant (et je viens de trouver le nom qui me trottait dans la tête, il s'agissait du symboliste Franz von Stuck) j'ai également trouvé ceci :

    http://nosex.tumblr.com/post/6838746636/le-serpent-salammbo-by-gabriel-ferrier-1899

    Pour ta belle dame, nous patienterons avec plaisir, l'attente est savoureuse... Le résultat sera grandiose, cela vaut la peine d'attendre. Nous ne doutons pas, que fin limier comme tu es, le billet sera étonnant et riche.

    Bisous Tilia et mille mercis pour ce passionnant article sur la belle Salammbo.

    Bisous
    Nath.

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    1. Hello Nath,

      Une fois de plus nous sommes d'accord ! Moi aussi, comme je l'ai dit un peu plus haut à Claude et à Françoise d'Autour-du-puits, j'ai sauté les scènes barbares du roman de Flaubert. Que ce soit en film ou en littérature, j'évite toute scène de cruauté, tant envers les humains qu'envers les animaux. On entend assez parler de catastrophes et de massacres dans le monde actuel pour que je trouve un quelconque intérêt à de telles descriptions, fussent-elles historiques.

      Ton enthousiasme pour ce billet me fait plaisir. Je dois cependant préciser que j'ai écrit : "À ma connaissance, il n'existe pas de peinture représentant le moment de l'histoire où, juste avant de se dévoiler pour être aussitôt recouverte par le voile de Tanit, Salammbô se trouve enlacée par Mâtho à genoux". Je n'ai pas dit qu'il n'y en avait pas parmi les innombrables illustrations du roman :)
      L'illustration de Lober-Riche que tu m'as indiquée en lien correspond bien à ce que dit Wikipédia de cet artiste "illustrateur, connu du public notamment pour ses représentations du monde de la galanterie." (lol !) Cependant, son illustration, si belle qu'elle soit, ne correspond pas au texte de Flaubert. Lorsque Mâtho supplie Salammbô de ne pas quitter sa tente et de rester auprès de lui, elle n'est pas encore déshabillée. Les sculptures de Th. Rivière le montre bien.

      Tu ne m'étonnes guère en disant qu'il y a d'autres représentations de Salammbô "armée". L'héroïne de Flaubert, dont l'existence n'a rien d'historique puisque totalement issue de l'imagination de l'auteur (contrairement à son père Hamilcar Barca et aux autres protagonistes de la révolte des Mercenaires et de la chute de Carthage) Salammbô a été victime de son succès. Au vingtième siècle, elle a été mise à toute les sauces picturales, à commencer par la BD de Ph. Druillet dans laquelle Salammbô, hypertrophiée du buste avec des seins agressifs comme des obus, est effectivement transformée en vestale "armée" (lol !). Pour justifier son graphisme un tantinet racoleur, Druillet se réfère à l'art africain. Manque de bol, les Carthaginois sont des Phéniciens, un peuple sémitique de l'Antiquité qui n'a rien à voir avec l'art d'Afrique Noire. Résultat des courses, à la représentation de Salammbô dans sa BD, je préfère de loin celle du jeu vidéo.

      Quant à la Salammbô de Gabriel Ferrier, je ne l'ai pas montrée pour plusieurs raisons. La première étant que je n'ai pas trouvé de reproductions en couleurs de ce tableau sur la toile et aucune information à son sujet. De plus, je pense le faire figurer (avec d'autres peintures de Salammbô au serpent) dans un billet à venir. Je ne t'en dis pas plus, sauf que ce sera l'occasion d'un rapprochement de tableaux inattendu...

      Pour la mystérieuse dame, j'ai beau avoir du flair, j'ai beaucoup de mal à discerner le vrai du faux dans les informations contradictoires des chroniqueurs de l'époque. La synthèse des nombreux documents accumulés au fil de mes recherches ne va pas être chose facile et la parution du billet risque hélas d'en être retardée.

      Pardon pour cette réponse un peu longuette, bisous et à bientôt, chère Nathanaëlle, pour un nouveau billet dans tes merveilleuses étoiles

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    2. Coucou Tilia !

      Merci pour toutes ces compléments sur ce billet si interessant. Oops, ne n'ai pas lu tes réponses plus haut, oui moi aussi je n'ai pas terminé ce livre, j'aurais dû sauter les scènes dures, (j'en ai horreur) mais ce n'était peut-être pas le bon moment pour le lire, il faudrait que je me replonge dans "Salammbo" aujourd'hui (j'étais plus jeune lors de cette lecture...).

      Ah les illustrateurs qui commettent ce genre d'erreurs c'est inadmissible, on se documente, on lit le livre, c'est un minimum ! lol ! Alors de 2 choses : soit c'est pour attirer le lecteur dans la perspective de se régaler de scènes olé olé, quitte à trahir le texte, comme c'est le cas ici, soit c'est une directive de l'éditeur...(cela arrive souvent), mais comme il s'agit d'un illustrateur de scène dites "galantes" lol il a fait du sensationnnel lol

      Rrrr Druillet m'agresse ! Carrément. Et depuis longtemps. Je ne comprends pas son Art. Sa Salammbo est, hélas, affreuse. Son inspiration africaine est une grossière erreur, là aussi, on se documente, s'il l'a fait exprès : c'est stupide.

      Ouiii ! lol Celle du jeu vidéo est très jolie lol
      J'aime beaucoup celle de Gaston Bussières que l'on voit sur la page wiki, celle de 1907, elle a un air angélique. Celle au serpent de 1910 est moins innocente lol

      Si je trouve en couleur le tableau de Ferrier je te le ferai passer, il faut que je cherche dans mes paperasses lol Je viens de demander à mister google, il y en a un, mais l'image est toute petite lol je sais qu'il en existe une autre, mais je ne me souviens plus du nom de l'artiste, un nom comme "Tourtot" si cela te dis quelque chose... mais j'ai trouvé ceci :
      (illustrations d'Auguste Jean-Baptiste Roubille 1872-1955 et celle d'Haydn Mackey que j'aime beaucoup).

      http://frankzumbach.wordpress.com/2012/02/13/flaubert%C2%B4s-salammbo%C2%B4-illustrated-via-salammbo-illustre-haydn-mackeyauguste-jean-baptiste-roubille/

      Bisous Tilia et merci pour cet échange passionnant.

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    3. Toujours en phase avec toi ! dans la sélection d'images prévues pour ce présent billet, j'avais retenue celle de Mackey la première sur la page que tu m'as mise en lien. De plus, toujours comme toi, j'aime aussi beaucoup la Salammbô de 1907 de Bussière. Je la garde pour un autre usage, vu que malgré sa beauté elle ne correspond à rien dans les descriptions de Flaubert.
      Le nom que tu cherches, c'est Toulot. Mais, comme pour Ferrier, sur la toile on ne trouve que du noir et blanc :((
      J'ai vraiment du mal avec les reproductions noir et blanc de tableaux en couleurs ! Si par hasard tu trouves dans tes livres des repros couleurs de la Salammbô de Gabriel Ferrier et de celle de Jules Toulot, je te remercie d'avance de me les scanner.
      En conclusion, tout ce dont on vient de parler se trouve déjà dans la réserve de mon prochain billet. Si tu ne trouves pas de repros en couleur, tant pis, je les publierai en N&B.
      Bises, bon dimanche Nath, et grand merci pour ton aide

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  14. Beau billet encore une fois et toujours aussi bien documenté. C'est vrai que cette vision de Flaubert correspond à la mode de l'orientalisme que l'on retrouve partout, et notamment en peinture. Mais il a fait plus fort que tous en créant un mythe et en le situant à Carthage, la maudite, depuis qu'elle s'était dressée contre Rome. Merci de nous donner envie de relire Flaubert. De toutes, c'est tout de même celles de Mucha et Strathmann que je préfère. Merci encore Tilia.

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    1. À propos d'orientalisme, c'est comme pour tout. Il y a les consciencieux et les autres. Je préfère largement ceux qui sont allés observer sur place avant de se mettre au boulot, tels Flaubert ou Étienne Dinet, à ceux qui se sont contentés de coller des djellabas et des turbans sur leurs personnages... ou de dénuder leurs odalisques.

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  15. Éblouissant, ce billet et passionnant sur tous les plans. Les documents photo sont superbes. J'ai une préférence pour Mucha dont le talent m'a toujours touché.
    Tiens, je vais relire Flaubert, tu m'en as donné l'envie.
    Belle journée, Tilia et à bientôt,

    Roger

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    1. Merci pour le compliment, je suis contente d'avoir éveillé ton intérêt au point de relire ce roman qui, un siècle et demi après sa parution, n'a pas pris une ride.
      Bon week-end, Roger, amitiés

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  16. Bien. Vous me prenez en défaut et je vais l'avouer tout de go : je n'ai jamais lu ce Flaubert ayant d'ailleurs conservé une impression assez mitigée de sa Bovary. Ce ne serait pas très grave si je n'étais pas professeur de littérature française depuis trente ans. Honte à moi donc... mais je vous promets que je l'aurai lu d'ici le 24 novembre et que je serai donc à même d'apprécier à sa juste mesure toute la richesse de votre billet.

    Vous savez ce que je regrette : Michelaise nous a récemment parlé de la possibilité de faire imprimer une sélection de billets sous forme de livre. Il faudrait lui redemander l'adresse ou retrouver son billet sur son sujet. J'avoue que, si d'aventure vous tentiez l'expérience, je serais preneuse, car je suis encore de la civilisation du livre et j'aimerais avoir vos billets sous forme papier pour les apporter sur ma table de travail, les souligner, les annoter. Qu'en pensez-vous?

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    1. Si vous avez lu mes réponses à Nathanaëlle, vous savez que moi non plus je n'ai pas lu tout le roman :)
      Je me suis contentée des résumés et analyses pertinentes disponibles sur la toile, ou dans les ouvrages de référence, tels que le "Dictionnaire des œuvres" (collection Bouquins) par exemple.
      Par contre, j'ai lu avec une extrême attention tout ce qui concerne Salammbô, comme vous avez pu le voir avec les extraits du texte correspondants aux illustrations que j'ai publiées (ces extraits sont des images, on peut cliquer dessus pour les agrandir afin d'en faciliter la lecture).
      Pour l'article dont vous parlez, je ne suis pas au courant. Par conséquent, je n'ai pas d'opinion sur la question. Des lecteurs m'ont déjà contactée par courriel pour me demander la permission de recopier tel ou tel de mes billets. Permission accordée, dans la mesure où ces personnes s'engagent à ne pas les rediffuser sur internet et à ne pas les utiliser (tout ou partie) dans le cadre d'un ouvrage sur papier. Pour un usage strictement personnel, aucun problème, tout un chacun peut imprimer mes billets, cela va sans dire.

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  17. J'ai lu Salambo, j'avais 16 ans avec beaucoup.... disons d'émotion. Elle a travaillé mon imagination déjà fertile des choses du sexe. Quel chaud souvenir, avec Antinéa ces deux là m'ont enflammées pour longtemps...

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    1. Entre Salammbô et Antinéa, il y a Ayesha, la plus fascinante des trois, à mon avis.
      Celle-qui-doit-être-obéie a été citée par C. G. Jung comme parfait exemple de l'archétype féminin.

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  18. Passionnant!

    Moi non plus je n'ai pas lu Salammbô en entier-à ma grande honte-juste des extraits, et pourtant j'admire profondément Flaubert.


    Les illustrations de Mucha ,Carl Srathmann, et le tableau de Gaston Bussière me plaisent beaucoup.
    Je suis contente que mon court commentaire sur Rochegrosse m'ait permis de découvrir ce passionnant tour d'horizon

    C'est sans doute intéressant que des expositions réhabilitent les "pompiers" et Rochegrosse , justement, mais...point trop n'en faut!

    Le style de de F_Louis Schmied me rappelle celui d' Erté et de

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    1. L'arrière plan de la Salammbô du musée Anne-de-Beaujeu de Moulins, où se tient l'actuelle exposition actuelle Rochegrosse, me paraît être une bévue de la part de l'artiste, vu que cet arrière plan est directement inspiré des fresques des tombes égyptiennes et que l'Ancienne Égypte n'a pas grand chose à voir avec la Carthage d'Hamilcar Barca et de Salammbô. C'est en ce sens (ou plutôt, ce contre sens) que l'on pourrait qualifier ce tableau de "pompier". Cependant on peut excuser cette erreur, car à l'époque de Flaubert très peu de gens avaient une idée précise de l'histoire et de la civilisation carthaginoise.

      Le style de la Salammbô de F. Louis Schmied semble plus proche de l'Art Déco que de l'Art Nouveau de Erté et de Beardsley, mais tu as néanmoins raison de faire le rapprochement.

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  19. Je n'ai pas lu Salammbô,-comme d'autres non lecteurs-
    mais j'ai lu avec beaucoup d'intérêt:

    Comment parler des livres qu'on n'a pas lus
    (Si! Si!)

    http://www.leseditionsdeminuit.eu/f/index.php?sp=liv&livre_id=2514

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    1. Grand merci pour ce lien vers le livre génial de Pierre Bayard, je vais sans doute le commander.

      Il m'est souvent arrivé de parler de livres que je ne me suis pas donnée la peine de lire en entier, vu que le Dictionnaire des Œuvres et celui des Personnages de la collection "Bouquins" sont très instructifs ;-)

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  20. Bonsoit Tilia,
    Bravo pour cette documentation sur Salammbô. Très bien.
    J'aime bien ces illustrations que tu as mises : Ô Tanit ! par Georges Rochegrosse ; Salammbô
    Gaston Bussière - 1920 : Salammbô de Carl Strathmann - 1895.
    Pour ma part, j'ai connu d'abord Salammbô avec J. Martin dans Alix et le Spectre de Carthage " Occupé à ses recherches, Alix sent le sol céder sous lui. Il se retrouve dans un sous-sol où il est sauvé par une lointaine descendante de la mythique Salammbô ".
    C'est tragique mais il émanait quelque chose de magique avec Samthô vêtu du Voile de Salammbô.
    Bref, merci encore pour raviver ses souvenirs. Je vais aller relire Flaubert et rêver.
    Nuageur.

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  21. Bonjour depuis 2021, je faisais des recherches sur l'orientalisme en peinture et j'ai retrouvé ton article. Je participe à un challenge "le tableau du samedi", et je pense que je vais choisir la Salammbô de Carl Strathmann. Merci une fois encore pour la richesse de tes articles et j'espère que tu vas bien.
    Le blog où je participe à ce petit jeu :
    http://entretoilesetpapiers.eklablog.com/
    Amitiés Françoise/Fardoise

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