À New-York de nos jours, Halloween est devenue une sorte de grand carnaval des squelettes.
NYC Village Halloween Parade 2010 crédit photo |
La New York Village Halloween Parade est le plus grand défilé au monde sur les thèmes traditionnels de cette fête, à l'origine celtique, célébrant la fin de vie. Les squelettes y sont légions, sous forme de mannequins ou de marionnettes géantes, sans compter les costumes des participants.
New York's Village Halloween Parade October 31st, 2008 in New York City crédit photo |
Vidéo 2010
NYC Village Halloween Parade 2010
ces squelettes me rappellent quelque chose !...
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Squelettes se disputant un hareng-saur (Art Ensor) James Ensor - 1891 Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (notice) |
La mode d'Halloween est trop récente pour que l'on trouve dans les musées des tableaux qu'elle aurait inspirés. Mais il existe deux peintres dont l'œuvre est bien en rapport avec l'esprit d'Halloween. Comme par hasard, ce sont deux peintres belges. Le premier est James Ensor. Le second est Paul Delvaux, dont les squelettes semblent découler de ceux d'Ensor.
Pierrot et les squelettes James Ensor - 1905 tableau non localisé |
À la suite de son échec au Salon des XX et des deuils successifs de son père et de sa grand-mère (auxquels il était très attaché), l'inspiration d'Ensor tourne au macabre et c'est à partir de cette funeste année 1887 que les squelettes prennent une place importante dans son œuvre.
Squelettes dans l'atelier James Ensor - 1900 Galerie nationale du Canada (lire la notice) |
Tandis que les masques, rappelant l'étrange ambiance du magasin familial de son enfance, camouflent une réalité trop laide ou trop cruelle à ses yeux, pour James Ensor les squelettes, réminiscences du carnaval d'Ostende, dénoncent l'absurdité du monde où il vit.
Malgré tout, quelques uns de ses tableaux sont empreints d'une certaine poésie. La lampe, suspendue au dessus de Pierrot, se retrouve à côté du poële autour duquel deux squelettes essaient de se réchauffer
Malgré tout, quelques uns de ses tableaux sont empreints d'une certaine poésie. La lampe, suspendue au dessus de Pierrot, se retrouve à côté du poële autour duquel deux squelettes essaient de se réchauffer
Squelettes essayant de se réchauffer James Ensor - 1889 Kimbell Art Museum, Texas (notice) |
Les squelettes de James Ensor ne sont jamais totalement nus. Par contre, ceux de Paul Delvaux sont quasiment toujours dans le plus simple appareil, tout comme la plupart des femmes qui figurent dans ses tableaux.
La Vénus endormie Paul Delvaux - 1944 Tate Gallery, Londres (lire la notice) |
La Vénus endormie est un thème récurrent dans l'œuvre de Paul Delvaux. Elle trouve son origine dans une représentation du corps féminin, entrevue par Delvaux en 1932 à l'entrée d'une baraque de la foire du Midi où était exposée la collection de cires anatomiques réalisées au dix-neuvième siècle par Spitzner, sculpteur-mouleur à la faculté de médecine de Paris. Les cires faisaient partie d'une attraction itinérante, présentée dans les foires et marchés de Belgique, afin de montrer au public les dernières découvertes scientifiques. Cette Vénus "respirante" à durablement marqué l'imagination du peintre.
Les grands squelettes Paul Delvaux - 1944 Collection privée (crédit photo) |
Le Squelette à la coquille Paul Delvaux - 1944
Collection privée, Genève (notice, en anglais)
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Dans le tableau du Squelette à la coquille, il y a deux squelettes. L'un(e) est gracieusement accoudé(e) au dossier d'un divan récamier tout de rose capitonné, tandis que l'autre se penche pour ramasser un coquillage. On pourrait interpréter ce tableau de plusieurs manières. La plus simpliste : compte tenu du symbolisme du coquillage (image du sexe féminin) et du fait que l'autre squelette se trouve sur un lit, pas besoin de vous faire un dessin !...
Mais, biologiquement une coquille étant le squelette externe de l'animal qui la quitté, l'intérêt du squelette pour la coquille qu'il s'apprête à ramasser repose peut-être sur cette simple similarité. Une hypothèse qui a le mérite de cadrer avec maintes peintures de Paul Delvaux, où l'on voit des hommes de science en costume en train d'observer des dames déshabillées, dont la nudité peut symboliser l'état de nature. L'homme moderne, toujours en quête de savoir scientifique, passe à côté des enseignements traditionnels de la Nature...
Conversation Paul Delvaux - 1944 Henry Simon Collection |
L'être et son devenir...
Les squelettes Paul Delvaux - 1944 Galerie Patrick Derom, Bruxelles |
Notez la présence d'une bibliothèque en arrière plan...
Squelettes dans un bureau Paul Delvaux - 1944 Musée de Jerusalem |
...les squelettes de Paul Delvaux semblent aimer les livres !
Avant de terminer, petite illustration musicale et dansante :
Camille Saint-Saëns (ça tombe sous le sens)
Et pour finir, un peu de linguistique humoristique : sachez qu'il ne faut pas confondre un squelette avec un(e) "esquelette". Un(e) esquelette est un squelette avec un cataplasme sur une jambe de bois !
Dernière chose, au cas où vos souvenirs de Sciences Nat' auraient un peu pâli, ce squelette vous remettra toute sa panoplie en mémoire.
Bonnes fêtes de Samain à toutes et à tous !
EDIT
Grâce au commentaire bien inspiré de Hazló (merci à vous, Hazló) je viens de découvrir la "Santa Muerte". Si comme moi vous êtes curieux d'en savoir plus, cliquez ici, c'est franchement étonnant.
©VesperTilia, échos-de-mon-grenier 2011
Cela ne prend pas tellement en France... Bises et belle journée.
RépondreSupprimerSquelette, du provençal : esqueleto !!!
RépondreSupprimerUne femme nue est quand même bien plus belle en chair qu'en os !!!
RépondreSupprimerbonjour Tilia,
RépondreSupprimerTrès bien vue, cette actualité de Toussaint!
C'est vrai que le monde d'Ensor évoque vraiment les fêtes d'Halloween, ou les carnavals Mexicains et la "Santa Muerte". On entendrait presque les bruits de la rue et les danses des tibias qui s'entrechoquent... Un exorcisme quoi!
Par contre celui de Delvaux? Un monde froid et silencieux où les représentations sont comme les images d'un rêve, où même les squelettes ne produiraient aucun son, aucun clac-clac. Des instantanés apparemment sans queue ni tête. Sans jeux de mots non plus! D'ailleurs ils y seraient tout à fait déplacés...
La version "Ensor" est tellement plus humaine, avec ses harengs-saur!..
Ensor est un génie!..j'aime les deux peintres..ces tableaux de delvaux (squelettes)..une découverte!
RépondreSupprimerNe suis pas fan de Delvaux... Il y fait trop froid! En revanche Ensor!!! Merci à vous de ce billet!
RépondreSupprimermagnifique repoortage à nos chers devenirs squellettes
RépondreSupprimerUn peu d'actualité, un peu de musée et une pincée de mythologie, quoi de plus pour bien commencer un mois qui nous dirige vers le froid (quoique le soleil est au rendez-vous aujourd'hui):-)
RépondreSupprimer@ PATRIARCH
RépondreSupprimerEffectivement, guère de défilé comme aux U.S. Mais les enfants du voisinage viennent tous les ans sonner à notre porte pour réclamer des bonbons. Ils sont charmants sous leurs maquillages de squelettes ou de sorcières hilares.
Bises et belle semaine pour vous deux
@ AVIGNON
Et de l'espagnol esqueleto
et du basque eskeletoa
@ CLAUDE
Entièrement d'accord avec toi. Mon époux à une sainte horreur des sacs d'os :D
@ HAZLÓ
Bonjour Hazló,
Merci pour votre appréciation et surtout, grand merci pour votre mention de la "Santa Muerte" dont j'ignorais tout.
Les squelettes d'Ensor ne sont pas issus de la même source que ceux de Paul Delvaux. Pour Delvaux, le squelette est un souvenir de sujet d'étude, alors que pour Ensor, les squelettes font partie de ses souvenirs du carnaval d'Ostende. C'est effectivement toute le différence entre raison et sentiment.
Le Surréaliste Delvaux ne peut se comparer à l'Expressioniste, proche du fantastique, Ensor. Difficile pour moi de faire un choix, j'aime bien les deux.
@ ELFI
Tout comme moi, Elfi !
@ CHRI
Comme je le dis à Hazló, personnellement, j'aime bien les deux. Merci de votre fidélité.
@ FRANKIE PAIN
Bienvenue au grenier, Frankie, et merci pour votre gentil message.
@DÉTAILS
Tu as apprécié la recette de mon brouet de sorcière, on dirait ;-)
De François Villon, la célèbre ballade (sans retour)
RépondreSupprimerFrères humains, qui après nous vivez,
N'ayez les coeurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
Quant à la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s'en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !
Se frères vous clamons, pas n'en devez
Avoir dédain, quoique fûmes occis
Par justice. Toutefois, vous savez
Que tous hommes n'ont pas bon sens rassis.
Excusez-nous, puisque sommes transis,
Envers le fils de la Vierge Marie,
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l'infernale foudre.
Nous sommes morts, âme ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !
La pluie nous a débués et lavés,
Et le soleil desséchés et noircis.
Pies, corbeaux nous ont les yeux cavés,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais nul temps nous ne sommes assis
Puis çà, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charrie,
Plus becquetés d'oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !
Prince Jésus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu'Enfer n'ait de nous seigneurie :
A lui n'ayons que faire ne que soudre.
Hommes, ici n'a point de moquerie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !
@ JEANDLER
RépondreSupprimerMerci pour la ballade de Villon...
illustration
Je connaissais New York pour sa célèbre Easter Parade, mais je ne savais pas que les squelettes défilaient de cette façon le 31 octobre! Ce sera donc une date à retenir pour une prochaine visite du côté de la grosse pomme!
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup apprécié les toiles d'Ensor que vous nous avez présentées. C'est un angle intéressant pour aborder la fête de l'Halloween!
@ MARIE-JOSÉE
RépondreSupprimerRavie de vous avoir fourni une idée de balade pour la prochaine Halloween !
Vous ne dites rien de l'entrée esquelette dans le dictionnaire du français du Canada. Auriez-vous manqué ce lien à la fin de mon billet ? J'aurais aimé savoir si cette "prosthèse" vous est familière, ou si cette façon de parler est complétement tombée en désuétude ?...
Je n'ai aimé ni Delvaux ni Ensor - décidément les squelettes ce n'est pas mon genre en peinture !
RépondreSupprimerEn revanche merci pour la vidéo des squelettes à NYC et celle sur St Saens.
Ton billet est génial. Je me suis régalée en te lisant. D'abord ces photos du carnaval d'Halloween, je ne savais pas que cette fête donnait lieu à de telles manifestations.. et puis les correspondances établies avec Delvaux et Ensor!
RépondreSupprimerTu veux pas venir nous rejoindre dans mon challenge romantique (je le publie aujourd'hui) pour nous parler de la peinture romantique (pas obligatoirement française), celle qui n'est pas connue? j'ai vu par exemple une reproduction de Ivan Aivazovsky que je ne connais pas du tout mais qui m'a intéressée à priori ou encore la peinture anglaise de Fussli qui a l'air d'avoir une imagination délirante.
Encore bravo pour ton billet!
Tu te doutes que j'adore Delvaux , il est né pas loin de chez moi. Les squelettes c'est un peu moins ma tasse de thé
RépondreSupprimerBonne fin de journée
@ NATHALIE
RépondreSupprimerAu moins as-tu trouvé quelque intérêt à mon billet hétéroclite ;-)
@ CLAUDIALUCIA
RépondreSupprimerC'est avec plaisir que, l'occasion se présentant, j'honorerai ton aimable invitation. Tu peux compter sur moi pour dénicher, non seulement en peinture, mais aussi en musique ou en poésie, des appartenances au Romantisme peu répandues. Cependant, je trouve le romantisme d'Aivazovsky trop échevelé à mon goût. Quant à Fussli, c'est un gros morceau ! cependant lorsque mon humeur s'y prêtera, je ferai volontiers un billet sur tel ou tel de ses cauchemars.
Sur ce, je file chez toi, lire le billet de présentation de ton Challenge Romantique, histoire de voir à quoi je viens de m'engager ;-)
Merci pour ton compliment et à très bientôt
@ PAT
RépondreSupprimerLes squelettes d'Ensor peuvent être poétiques, mais relèvent pour la plupart du Fantastique, ce qui n'est pas toujours pour me plaire.
Quant aux squelettes de Delvaux, je les trouve élégants, voire amusants !
Squelettes élégants ou amusants, je veux bien mais ce ne sont que des squelettes et j'aime pas........ Ton billet est excellent ! Bravo !
RépondreSupprimerA bientôt
Bonne soirée !
@ ENITRAM
RépondreSupprimerDonc tu n'aimes pas non plus les danses macabres médiévales. J'avoue que je n'en raffole pas plus que to ! Par contre, j'adore les films du genre L'Étrange Noël de monsieur Jack ou Noces funèbres ;-)
Bonne fin de soirée, Enitram et merci d'être passée donner ton avis
Excellentissime billet pour Halloween (pardon je suis en retard...oops...lol) J'adore ce tableau de la Vénus endormie, il m'a toujours intriguée, et je le trouve beau. Mais j'aime bien Delvaux (merci pour la découverte du squellette à la coquille).
RépondreSupprimerLa danse macabre est extra! Je ne connaissais pas cette animation, elle est franchement réussie.
Juste un mot sur Santa Muerte : "bbrrrr" pas très engageante en effet...lol je préfère me confier à un Saint à visage humain. si les gens sont desedpérés, qu'ils prient Sainte Rita. On sait bien que notre ossature est ainsi faite, mais là, cela fait presque peur.
Bisous et bon mois de novembre !
Nath.
@ NATHANAËLLE
RépondreSupprimerComme d'habitude, j'ai découvert tout ça au fil de mes recherches. Je connaissais bien sûr le hareng-saur d'Ensor (lol) mais jusqu'à il y a peu, les squelettes de Delvaux ne m'avait pas vraiment frappée. C'est effectivement Le squelette à la coquille qui m'a mis la puce à l'oreille. Je suis persuadée qu'il y a un sens caché derrière ce tableau.
Pour l'animation, j'ai beaucoup hésité entre la version originale de la Marche funèbre pour une marionnette de Gounod, et cet arrangement que je trouve plus amusant. Finalement, le bon Saëns a tranché !
Bien d'accord avec toi pour Santa Muerte. Je l'ai ajouté à titre purement documentaire. Si je devais choisir un culte, ce ne serait surtout pas celui-là. Je me tournerais plutôt vers la Wicca, mais de préférence en solitaire !
Bisous et bonne suite automnale à toi aussi
Oui, il y a un sens caché dans ce "squelette au coquilage" que je ne saisis pas, le squelette et le coquillage sont dans un cercle, le symbole du coquillage est la pureté et la fécondité...
RépondreSupprimerBon choix de vidéo, la danse macabre était le meilleur choix.
Heu..je te laisse la Wicca.. brrrr lol je préfère les Anges et les Archanges...
Bisous